Florence Daine Journaliste nutrition
Publié le , mis à jour le
Acide aminé utilisé pour élaborer les protéines corporelles, la glutamine est aussi le précurseur d’autres composés importants pour l’organisme et constitue une source d’énergie non négligeable pour certains types de cellules. Son intérêt dans le traitement des maladies intestinales n’est pas encore complètement démontré. Une supplémentation n’est justifiée que dans certaines situations pathologiques.
Sommaire
- Qu’est-ce que la glutamine?
- Les bienfaits de la glutamine
- Les sources alimentaires de glutamine
- Situations à risque de carence en glutamine
- Indications à la supplémentation en glutamine
- Effets secondaires de la supplémentation en glutamine
- Contre-indications de la glutamine
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Qu’est-ce que la glutamine?
La glutamine est un acide aminé présent dans le corps. Il s'agit d'une petite molécule constituée d’atomes de carbone, d’hydrogène, d’oxygène et d’azote, indispensable à la santé.
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Elle compte parmi les 20acides aminés nécessaires à l’être humain pour élaborer les protéines corporelles (protéines musculaires, anticorps, enzymes…) et d’une façon générale, entre dans la composition des protéines des organismes animaux et végétaux.
La glutamine est classée parmi les acides aminés conditionnellement indispensables: chez une personne en bonne santé, une production endogène (par l’organisme) complète les apports alimentaires. En revanche, lorsque les besoins du corps sont majorés, par exemple en cas de traumatisme, de maladie, d’infection… Il peut arriver que l’organisme ne soit pas en mesure d’en produire suffisamment, ce qui implique de trouver cet acide aminé dans les aliments.
Mise à part son rôle dans la synthèse protéique, la glutamine peut être utilisée pour produire d’autres acides aminés - alanine, aspartate, citrulline, glutamate, ornithine, proline - ou des purines, constitutives de l’ADN (acide désoxyribonucléique) et de l’ARN (acide ribonucléique) -supports de l’information génétique- 1.
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On la retrouve sous forme de poudre ou de gélule (complément alimentaire) en pharmacie et sur Internet.
Les bienfaits de la glutamine
La glutamine a fait l’objet de nombreux travaux scientifiques, qui ont démontré son caractère essentiel au bon fonctionnement de l’organisme.
Elimination des "déchets azotés"
Dans l'organisme, la glutamine permet la synthèse d’ornithine et de citrulline, des acides aminés absents des protéines alimentaires qui contribuent à réguler l’ammoniémie (taux d’ammoniac sanguin).
Dans le tube digestif, la glutamine peut être transformée en glutamate, puis au final en ornithine, qui peut à son tour donner naissance à de la citrulline. Ornithine et citrulline se retrouvent ensuite dans le foie et dans le rein.
Au niveau du gros intestin, la transformation d’ornithine en citrulline permet de "recycler" l’ammonium (ion dérivant de l’ammoniac, dont la proportion augmente avec l’apport de protéines) dont une concentration excessive est délétère pour les cellules intestinales.
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Au niveau du foie, l’ornithine permet de convertir de l’ammonium en urée, qui pourra être éliminée dans les urines et le glutamate peut redonner naissance à de la glutamine, réduisant ainsi la proportion d’ammonium. Ce système de détoxication protège le système nerveux (très sensible aux excès d’ammonium) et est d’autant plus actif que l’apport en protéines est élevé (plus l’apport est important, plus les acides aminés provenant des protéines sont utilisés à des fins énergétiques, avec pour conséquence une production accrue d’ammoniac).
Au niveau du rein, la citrulline peut donner naissance à de l’arginine, un autre acide aminé impliqué dans le contrôle de l’ammoniémie1.
Intégrité de la muqueuse intestinale
La muqueuse intestinale exerce une fonction barrière, qui évite à divers toxiques, allergènes ou microorganismes de pénétrer dans l’organisme. Lorsqu’elle dysfonctionne et que des corps étrangers parviennent à la traverser, le système immunitaire intervient. Il s’ensuit une réaction inflammatoire, qui favorise le développement ou entretient diverses affections. L’effet barrière de la muqueuse intestinale dépend notamment de protéines dites des jonctions serrées, occludines et claudines, qui assurent une cohésion entre les cellules intestinales. Des travaux de recherche ont montré que la glutamine joue un rôle majeur dans le maintien de l’intégrité de ces jonctions serrées2.
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Fourniture d’énergie
La glutamine peut servir de source d’énergie, en particulier pour les cellules du tube digestif (entérocytes) et les cellules immunitaires (globules blancs), qui en sont de grosses consommatrices. En outre, en période de jeûne, par exemple au cours de la nuit, elle participe activement à la néoglucogenèse: production de glucose (sucre qui constitue le carburant prioritaire de certains organes tels que le cerveau), principalement par le foie, à partir des réserves de lipides (graisses) et des protéines musculaires (alors décomposées en acides aminés)1.
Les sources alimentaires de glutamine
La glutamine est présente au sein de l’ensemble des aliments contenant des protéines. Cet acide aminé est particulièrement bien représenté dans:
- Les viandes et les volailles;
- Les poissons;
- Les produits laitiers: lait, laitages (yaourts, petits-suisses…), fromages;
- Les légumineuses: légumes secs (lentilles, pois chiches, haricots blancs…) et soja;
- Les céréales (les céréales complètes en contiennent un peu plus).
Situations à risque de carence en glutamine
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La glutamine est présente dans de nombreux aliments, il y a peu de risque d’en manquer en raison d’un régime déséquilibré.
Le risque de carence en glutamine existe principalement dans certaines situations pathologiques:
- En cas de maladie intestinale ou d’insuffisance hépatique (maladie du foie) limitant la possibilité de l’assimiler ou d’en produire.
- En situation d’agression: blessure, brûlure, infection, intervention chirurgicale…La diminution du taux sanguin et de la concentration musculaire en glutamine alors observée traduit une production endogène (par l’organisme) insuffisante3.
Indications à la supplémentation en glutamine
Dans le cadre de l’immunonutrition
A forte dose, la glutamine présente un intérêt pour stimuler les défenses immunitaires de l’organisme. Elle peut être prescrite à des patients hospitalisés en réanimation (sous forme d’alimentation parentérale apportée par voie veineuse), pour prévenir les infections et réduire la durée d’hospitalisation3.
Dans le cadre de la pratique sportive
Il existe de nombreux produits / compléments alimentaires destinés aux sportifs contenant de la glutamine, seule ou associée à d’autres acides aminés (en apportant 0,5 ou 0,6 g par gélule ou dosette de poudre). En effet, au cours des entraînements de longue durée, et surtout si les glucides viennent à manquer, la glutamine peut servir de carburant à l’organisme. Il en résulte une diminution de la glutamine plasmatique (dans le sang), qui, dans la mesure où cet acide aminé est très utilisé par les globules blancs, expliquerait en partie la diminution de l’efficacité du système immunitaire dans les heures suivant un entraînement. Dans plusieurs études menées chez des sportifs, une supplémentation (par exemple, 7 g chez un sportif de 70 kilos) a permis d’augmenter la concentration plasmatique en glutamine, a limité la durée de perturbation des défenses immunitaires et a réduit l’incidence des infections des voies respiratoires supérieures (rhumes…).
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Néanmoins, faute de suffisamment d’études probantes, la supplémentation en glutamine n’est pas recommandée aux sportifs. Les scientifiques pointent le risque de déséquilibre métabolique et de conséquences délétères sur la santé pouvant être occasionnés lorsque certains acides aminés sont apportés en plus forte proportion que d’autres. Ils estiment que les besoins en glutamine du sportif sont bien couverts par une alimentation variée et apportant suffisamment de protéines - dont l’apport conseillé, 1,1 à 1,5g par kilo de poids corporel et par jour, est supérieur à celui des personnes sédentaires, 0,83 g par kilo et par jour)1.
Dans un avis publié en 2011, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa), a estimé que les études existantes ne permettent pas aux compléments alimentaires à base de glutamine de porter une mention quant à un intérêt pour le maintien ou l’augmentation de la masse musculaire, la réparation des tissus musculaires ou la restauration plus rapide des réserves de glycogène (forme de stockage du glucose) musculaire après l’effort4.
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La synthèse de 47 études, publiée en 2019, a confirmé que les travaux disponibles ne permettent pas de conclure à un intérêt de la glutamine pour améliorer les performances sportives5.
En cas de maladie digestive
Syndrome de l’intestin irritable, maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI) et maladie coeliaque, ont en commun une composante inflammatoire et sont fréquemment associées à un accroissement de la perméabilité intestinale. Puisque la glutamine contribue à l’intégrité de la barrière intestinale, une supplémentation en cet acide aminé pourrait être envisagée dans le cadre du traitement de ces maladies.
Des travaux menés sur des rongeurs soulignent son intérêt3. Par exemple, chez des rats souffrant d’une mucite (inflammation de la muqueuse intestinale) induite par une chimiothérapie anti-cancer, la supplémentation a permis de limiter la perméabilité intestinale et de stimuler l’activité des protéines des jonctions serrées6.
Quelques études ont été menées chez des personnes souffrant d’un syndrome de l’intestin irritable. Lors de la mise en culture de cellules intestinales prélevées par biopsie sur 14 volontaires, la présence de glutamine a stimulé l’activité de l’une des catégories des protéines des jonctions serrées (claudines), mais pas des deux7. Dans une autre étude, une cinquantaine de volontaires a reçu pendant 8 semaines un supplément de 5 g de glutamine par jour. 43% d’entre eux ont constaté une régression de leurs symptômes. La perméabilité intestinale a également été réduite8. Même si ces résultats sont encourageants, des travaux de plus grande envergure doivent être menés avant de pouvoir recommander une supplémentation en glutamine dans cette affection.
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Les études menées chez des personnes souffrant de la maladie de Crohn n’ont pour le moment pas donné de résultats positifs. Par exemple, une supplémentation orale de 7 g par jour pendant 4 semaines n’a pas permis de réduire la perméabilité intestinale9. Une synthèse des études d’intervention réalisées a conclu que la glutamine, apportée par voie entérale (par sonde) ou parentérale (par voie veineuse) ne semble pas avoir d’intérêt pour faciliter la rémission de la maladie. Les auteurs de cette revue soulignent néanmoins que les résultats pourraient être différents dans des travaux incluant davantage de patients10.
Au total, les travaux scientifiques disponibles ne permettent pas de recommander une supplémentation en glutamine en cas de troubles digestifs.
Effets secondaires de la supplémentation en glutamine
Dans le cadre de nombreuses études menées chez l’animal et chez l’homme, peu d’effets nocifs ont été rapportés à des doses comprises entre 0,1 et 0,4 g par kilo de poids corporel et par jour (par exemple, 6 à 24 g de glutamine par jour pour une personne pesant 60 kilos)1.
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Une étude est en cours pour évaluer la sécurité d’une supplémentation chez les personnes souffrant d’un syndrome de l’intestin irritable11.
Jusqu’à présent, aucune limite de sécurité n’a été définie pour la glutamine - et ce, quelle que soit sa forme : poudre ou gélule. Cependant, il n’est pas exclu qu’un apport à forte dose (supra-nutritionnelle) ne puisse avoir un impact négatif, en perturbant l’assimilation des autres acides aminés et par conséquent les différentes fonctions qu’exercent ces derniers au sein de l’organisme1.
NON aux régimes, OUI à WW !
Partenariat WW (WeightWatchers) : Faites-vous plaisir, mangez vos aliments préférés, et perdez du poids sans avoir faim.
Partenariat WW (WeightWatchers) : Faites-vous plaisir, mangez vos aliments préférés, et perdez du poids sans avoir faim.
Contre-indications de la glutamine
Par principe de précaution, la supplémentation en glutamine (quelle que soit sa forme : poudre ou gélule) est déconseillée aux femmes enceintes ou allaitantes en l’absence d’avis médical.
Suite à la déclaration d’effets indésirables auprès du dispositif national de nutrivigilance, l’Anses déconseille la prise de compléments alimentaires en vue de développer la masse musculaire (parmi lesquels ceux contenant de la glutamine) aux enfants et aux adolescents, ainsi qu’aux adultes présentant des facteurs de risque cardiovasculaire (antécédents chez les parents ou dans la fratrie, hypertension artérielle, tabagisme…) ou souffrant d’une maladie cardiaque, rénale, du foie ou psychiatrique12.
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En cas de cancer ou d’antécédents de cancer, il est prudent d’éviter toute supplémentation en glutamine, dont l’impact est encore mal connu1. En effet, dans l'organisme, la glutamine semble représenter une source de carburant privilégiée pour certains types de cellules cancéreuses13. Des chercheurs américains ont ainsi observé que des cellules cancéreuses du côlon porteuses d’une mutation du gène appelé PIK3CA, en utilisent de fortes proportions. Chez des souris chez lesquelles a été reproduit le même type de cancer, ils ont réussi à stopper l’évolution des tumeurs en administrant une substance bloquant le métabolisme de la glutamine14. Des essais cliniques sont en cours, afin d’évaluer l’intérêt de différentes substances interférant avec le métabolisme de la glutamine dans la prise en charge de personnes souffrant de cancers15.